Les Pyramides

Les Pyramides

par Benoît Pouvreau

Après avoir travaillé aux côtés d’Eugène Beaudouin aux Bas-Coudrais pour la Société centrale immobilière de la Caisse des dépôts et consignations (SCIC), mêlant individuel et collectif, Michel Andrault et Pierre Parat montent leur agence et travaillent à des études visant à renouveler l’approche de l’individuel. Cette démarche se nourrit de leurs premiers chantiers : une maison à Chaville en 1957, un plan masse? de 200 logements individuels à Wissous et un groupe de maisons individuelles à Clamart en 1961. Ils ont recourt à la brique, au béton ou à la pierre et reprennent le toit à un ou deux pans mais en accentuant ou en adoucissant les pentes. Andrault et Parat travaillent dès cette période à un projet de maisons en gradins offrant d’importantes terrasses. Ce projet plaît au ministre Sudreau qui leur apporte un soutien technique et financier mais ne leur propose pas de commande.
Alors qu’ils multiplient les chantiers de logements collectifs en province à partir de 1964, Andrault et Parat poursuivent leur recherche sur un habitat individuel différent. C’est pour répondre à la demande des Français en matière d’habitat individuel que le nouveau ministère de l’Equipement lance en 1966 le concours « Villagexpo ». Celui-ci réunit, à
Saint-Michel-sur-Orge, 187 maisons individuelles économiques édifiées par 22 équipes de « constructeurs – architectes » exposées au public durant l’automne. Andrault et Parat conçoivent le plan? masse de ce salon à ciel ouvert destiné à devenir un quartier à part entière, après l’exposition. Pour ce concours, le Ministère a notamment pour partenaire L’Office central interprofessionnel du logement (OCIL). L’OCIL, organisme collecteur du 1 % logement, est alors dirigé par Alexis Vibert-Guigue. Ce dernier s’intéresse beaucoup aux recherches sur l’habitat individuel et rencontre à cette occasion Andrault et Parat.
Après le succès de Villagexpo, le ministre Albin Chalandon lance son propre concours intitulé « Concours international de la maison individuelle » (CIMI), en 1969. Vibert-Guigue et l’OCIL concourent pour le CIMI et apportent à cette fin un terrain à Villepinte. Grâce à Vibert-Guigue, Andrault et Parat peuvent enfin réaliser leur « Pyramide ». Pour ce concours, l’OCIL fait également travailler Philippe et Martine Deslandes pour les maisons Piston et Cylindre, Marcel Lods, Paul Depondt et Henri Beauclair pour leurs modèles Pomone, Cérès et Flore et Gérard Grandval pour les maisons Béguine et Etamine. A Villepinte, le chantier démarre au printemps 1971.
En 1972, l’OCIL fait l’événement avec son « village » de Villepinte où sont réunis 5 pyramides de 33 « maisons individuelles superposées » ainsi que des logements Pomone, Cérès et Flore de l’équipe Lods, Depondt, Beauclair. Pour autant, vu la médiocrité des réalisations des autres participants, ce concours est rapidement associé aux malfaçons trop courantes dans ce qui fut bientôt appelé des « Chalandonnettes ».
Avec leur « maison individuelle superposée » ou Pyramide, Andrault et Parat offrent eux un logement collectif pourvu d’un « jardin suspendu » individuel, une belle terrasse? de 36 m², sans vis-à-vis et avec un accès quasi individuel. Ils apportent ainsi leur contribution au concept d’« habitat intermédiaire » proposé par Jacques Bardet à Boussy-Saint-Antoine. Chaque pyramide propose 33 logements : 11 logements sont en rez-de-chaussée?, 8 au 1er étage, 8 au 2ème, 4 au 3ème et 2 au 4ème. Le faible ensoleillement de certaines pièces, le parking situé au cœur de la pyramide, en rez-de-chaussée, comme l’accès intérieur au logement depuis ce dernier, jugés peu agréables et mal éclairés, sont les défauts les plus souvent relevés par les habitants. Cependant, ces derniers sont majoritairement satisfaits de leur logement et le peu de mobilité dans ces ensembles l’atteste. En accession sociale à la propriété, ces « maisons superposées » sont aujourd’hui du logement privé. Outre la pertinence du concept et la séduction qu’exerce inévitablement son nom, il convient de souligner l’élégance de cette architecture jamais massive. Les uns sur les autres, en retrait ou saillants, les logements s’individualisent tout en progressant vers le sommet. L’ensemble est en béton crépi de ciment blanc mais chaque logement est, dans sa partie supérieure, surmonté d’un bandeau de béton brut courant à l’horizontale sur l’ensemble de la pyramide. Egalement en béton brut, les escaliers ajourés zigzaguent jusqu’au 4ème étage tandis que les plantations et les claustras de teinte noire contrastent avec la géométrie et la blancheur dominantes.
Très en vogue dans la décennie 1970, fortement soutenus par le Plan Construction du ministère, Andrault et Parat vont multiplier les chantiers de pyramides du type de Villepinte ainsi que des maisons « gradins-jardins » dans de nombreuses villes nouvelles, en région parisienne comme en province.
En 2008, par le biais de la DRAC d’Île-de-France, le ministère de la Culture a décerné à cet édifice le label "Patrimoine du XXe siècle", aujourd’hui "Architecture contemporaine remarquable".

Date de construction
1969-1971
Organisme
service du patrimoine culturel de la Seine-Saint-Denis
Date de rédaction
28/09/2010
Code site
078inv010
Source
inventaire départemental
Auteur
Andrault Michel, Parat Pierre
Maitre d'ouvrage
Office central interprofessionnel du logement
Lieu-dit ou quartier
Quartier des Mousseaux
Parties constituantes
165 logements en copropriété, dans 5 pyramides de 33 « maisons individuelles superposées »,
Type d’étude et de recherche
Localisation
Chronologies
Auteurs / protagonistes