Un métier du patrimoine culturel : Alexandre, médiateur en archéologie

Un métier du patrimoine culturel : Alexandre, médiateur en archéologie

23 juillet 2021 , par Mohammed Alabi

Alexandre Tourville, médiateur du patrimoine spécialisé en archéologie
Une interview réalisée par Mohammed Alabi, stagiaire en médiation archéologique

Quels sont ton parcours de formation et tes choix professionnels ?
Après le bac, je m’oriente en licence d’histoire à la fac de Cergy, puis je fais un master de recherche qui a porté sur la Révolution française. Le parcours d’histoire n’offrant que deux possibilités - d’un côté, la recherche et de l’autre, l’enseignement - je me lance en tant qu’enseignant. Après un an d’expérience (une expérience qui ne m’a pas enchanté), j’ai dû tout de suite me réorienter vers mon domaine de prédilection : le patrimoine, non seulement pour ne pas perdre du temps mais aussi et surtout pour ne pas forcer les choses.

Fonte de bronze
Théâtre antique
Danse médiévale

Tu as été recruté à l’archéosite de la Haute-Île... peux-tu m’en dire quelques mots ?
C’est Caroline qui m’a fait confiance, elle m’a donné ma chance... et depuis quatre ans je suis médiateur à l’archéosite ! L’une des raisons pour lesquelles je suis aujourd’hui médiateur c’est parce qu’avant tout je suis pédagogue : on ne peut pas faire ce métier sans compétence pédagogique. Et je crois même que l’une des raisons pour lesquelles on me fait confiance ici c’est justement du fait de cette expérience. Comme quoi, tout se tient !
Mon expérience à l’archéosite est super variée. Je te donne quelques exemples qui m’ont marqués. La première année : Jeremy et Chloé, deux médiateurs ayant leur propre boîte de valorisation (Arkéo-Fabrik), sont venus animer un atelier dénommé « La fonte du bronze » et ils avaient construit leur propre four. A peine recruté, je vois ça, tu imagines ? C’est vraiment spécial comme expérience ! La deuxième année, une troupe de reconstituteurs, nommée Gladius scutumque et spécialiste du théâtre antique, a présenté la reconstitution d’une pièce de théâtre antique ; la troisième année, sur l’archéosite, le groupe Waraok a proposé une initiation aux danses du Moyen-Âge. Et cette année est prévu pour le mois de septembre un escape-game... Pour une personne ne connaissant pas ces domaines, voir tout cela, ça donne envie de rester !

Qu’est-ce que tu aimes dans ton métier de médiateur du patrimoine ?
Ce qui me plaît dans ce métier c’est de rencontrer des gens, d’échanger avec eux. Et le plaisir d’apprendre !
On apprend tout le temps de nouvelles choses, tous les jours ; par exemple je ne savais rien de la préhistoire avant de travailler à l’archéosite, et c’est ici que j’ai tout appris.
Quant aux échanges avec les visiteurs, je me souviens lors d’un atelier avec un groupe scolaire : on a fait du pain, avec des grains moulus sur des meules en pierre, et une petite fille avait fait de la farine, mais une farine vraiment fine et pure, j’étais stupéfait ! Elle m’a dit que sa mamie faisait encore de la farine de cette façon traditionnelle. Dans la même classe, l’enseignant m’expliquait qu’en Tunisie, on utilise des meules ressemblant à la meule rotative que nous avons à l’archéosite, qui est la reproduction d’une meule gallo-romaine... Partager les connaissances de cette façon, c’est super intéressant.

J’imagine qu’il y a des difficultés, parfois, dans ton travail...
Absolument ! J’ai aussi été confronté à une expérience assez déplaisante - une seule d’ailleurs - que l’on a partagée avec mes collègues Guillaume et Hallvard. C’était une classe de collège compliquée à gérer : les élèves étaient turbulents, les enseignants n’étant pas réactifs et ne cadraient pas le groupe avec nous. On ne prend pas plaisir, quand personne ne nous écoute on ne peut pas communiquer, et on ne peut pas faire notre travail correctement ! Pour mon collègue Halllvard, c’était à son premier jour, on peut dire que le "bizutage" n’était pas fameux pour lui...
En fait, la difficulté principale pour les professionnels de la médiation archéologique est qu’il n’y a pas beaucoup d’offres d’emploi, avec la crise sanitaire c’est encore plus compliqué. Les statuts sont souvent plus ou moins précaires, avec des contrats saisonniers ou des vacations. Un autre problème est que si tu n’as pas d’expérience, on ne te prend pas.